vendredi 29 janvier 2021

Il y a peu, un étudiant m'a posé une question à propos des préceptes. Les préceptes de bodhisattva, dans la tradition issue de maître Dôgen sont au nombre de seize, divisés en trois groupes. Le premier comprend les Trois Dévotions (au Bouddha, au Dharma et au Sangha), le second les Trois Préceptes Universels (nous y reviendrons), et les Dix Préceptes fondamentaux. 

Ces Trois Préceptes Universels, dans leur version la plus courante sont, "éviter de faire le mal", "faire le bien" et "faire le bien pour les autres". Mais maître Nishijima, les trouvant trop vagues, a voulu leur donner une acception plus concrète, plus applicable, et les a reformulés comme suit: "Observer les règles de la vie en société", "Observer la règle morale de l'Univers" et "Travailler à sauver tous les êtres vivants". Et c'est sur les deux premiers que les questions de cet étudiant portaient. 

Voici donc la première et la réponse que je lui ai faite:

"To observe the rules of society".

"Bon, heureusement, Brad concède que quand il y a des lois injustes il faut travailler à les changer tout en restant dans le cadre de la légalité telle qu'elle est établie à ce moment. D'une, Nishijima reformule quand même sacrément le précepte traditionnel en lui donnant un tour finalement assez politique et conservateur. Ça fonctionne dans la mesure ou on est dans des sociétés modernes relativement démocratiques j'imagine, mais on peut envisager beaucoup d'autres situations ou ce conformisme pourrait être problématique non? "To renounce or do no evil" est certes très général et vague mais a moins cette dimension politique, non? "

 Pour ma part, je crois que, même lorsqu'on veut modifier les règles sociales, la seule façon vraiment efficace au long cours est de rester au maximum dans les clous. "Observer les règles de la vie en société", c'est rester courtois, ne pas se mettre les gens à dos, respecter la 'décence commune' chère à Orwell, et se montrer généralement respectueux des autres avec lesquels on vit.

Cela paraît conservateur et "politique", mais c'est là que je pose la question: Qu'est-ce qui n'est pas politique?

Nishijima était plutôt conservateur, ce qui m'irritait parfois, mais aujourd'hui où je constate que la majorité des mesures liberticides sont des mesures de "gauche", je balance...

Mais toute mon expérience d'une vie, c'est surtout que, lorsqu'on considère que quelque chose est injuste et inacceptable, la seule façon de faire changer ces choses, c'est de travailler en douceur et sur le long terme. Toute impatience devient rapidement contre-productive, et je constate même aujourd'hui que le discours LGBTQ& tend à re-confiner les marginaux dans des mini-ghettos, et détruit paradoxalement les résultats de la lutte pour l'égalité des femmes et pour l'indifférence envers les choix sexuels.

C'est en ce sens que j'interprète le "observer les règles de la vie en société". 

Et puis, les "règles de la vie en société" correspondent-elles vraiment toujours avec les lois et les règlements? Il s'agit essentiellement de "ne pas faire le mal", c'est-à-dire de ne pas commettre des actes qui seront au détriment des autres, de l'environnement, de la société dans son ensemble.  Donc, on pourrait même dire que ce précepte couvre la désobéissance civile lorsqu'elle est nécessaire.


Aucun commentaire: