jeudi 30 avril 2009

Réincarnation vs renaissance

Je me suis fait rabrouer sur un forum italien parce que j'ai dit que le Bouddha avait nié la réincarnation. Evidemment, si l'administrateur du forum est un dévot "tibétain", il ne faut pas s'en étonner. Néanmoins, je trouve que cela appelle quelques remarques.

Dans le Brahmajala Sutta (Majjhima Nikaya 38), le Bouddha expose comment des ascètes qui ont pourtant de l'expérience et de la bouteille peuvent se tromper lourdement sur la signification de leurs "visions". Du genre de celle que Brad Warner expose dans son premier livre, où il voit se dérouler sous ses yeux tout le processus de contraction et d'expansion de l'Univers.

C'est là que le Bouddha expose comment un dieu, étant le premier à apparaître dans son "palais" peut en arriver à croire être le tout premier d'entre les dieux (voire le seul!). Il y expose aussi les doctrines éternalistes et annihilationnistes. Ces doctrines sont, respectivement, celle qui prétend qu'il existe à chaque être une "essence" permanente et inaltérable (ce que les Chrétiens et autres appellent "l'âme"), et qui, dans l'hindouïsme voyage de corps en corps, ce qu'on appelle la "transmigration des âmes" ou "réincarnation". L'autre étant qu'à l'opposé, à la mort, à la dissolution du corps, l'esprit disparaît lui aussi.

Ce qui est exposé dans les suttas, c'est que le "karma" de chaque être, à cause de sa peur panique de disparaître à tout jamais, est projeté sur un nouveau-né, nouveau-né qui aura le souvenir de la vie de quelqu'un d'autre, pourra éventuellement croire avoir été ce quelqu'un d'autre, et verra sa vie influencée par ce souvenir.

Ce que je puis en dire, à part ce qu'on peut lire dans les sutras, c'est que rien ne permet d'affirmer ou d'infirmer ces choses. On n'a jamais vu personne revenir pour nous dire ce qui en est, et il me paraît que si c'était possible, qui empêcherait quelqu'un d'apparaître à la télé quelque temps après sa mort (qu'est-ce qui empêcherait une telle personne de pirater les ondes???) pour annoncer à l'humanité ce qui en est de son futur après la mort...

Autrement dit, dans tous les cas de figure, on en est au strict niveau des spéculations, et qui plus est, des spéculations oiseuses. C'est bien pour cette raison que tous les maîtres zen ont toujours eu tendance à s'agacer des questions sur la réincarnation ou renaissance, comme on voudra. On a déjà tant à faire ici et maintenant, et il faudrait se prendre la tête sur des histoires de transmigration? Alors, le truc de la renaissance, comme je l'ai exposé ci-dessus, passe encore, mais franchement, la transmigration d'une âme inaltérable, cela me paraît illogique à partir du moment où on postule l'unité du corps et de l'esprit.

Quand en plus on sait l'usage particulièrement politique (et pas toujours de façon "noble") qui a été fait (et se fait toujours) au Tibet et dans les milieux tibétains de ces histoires, il me semble qu'on pourrait en revenir un peu. D'ailleurs, il me semble que le Dalaï-Lama commence à en voir les possibilités perverses sur lesquelles lorgnent les Chinois.

Alors, pourquoi ne pas cesser de délirer?

dimanche 19 avril 2009

Le moi, la conscience et la spiritualité

Je suis paresseux et pas très inventif en matière de blog, et je puise volontiers ailleurs. Voici ce qu'un correspondant du blog de Brad Warner écrivait l'autre jour, en gros:

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... La spiritualité est ce vers quoi tend Brad. A savoir, la conscience est-elle notre "propre" expérience individuelle ou bien une portion d'une expérience à plus grande échelle dont nous ne serions qu'une toute petite partie?

Selon certaines traditions hindouïstes, nous faisons partie, maintenant et à tout jamais, d'une seule substance. La conscience serait alors un état dans lequel (comme dans l'océan) des bulles surgissent, séparant ainsi une partie de l'eau du reste (les parties séparées étant le moi comme dans les individus). Lorsque ces "bulles de vie" éclatent, nous ne faisons plus qu'un avec la substance unique (un océan de ~ eau).

Cette théorie fonctionne bien avec les boucles de Planck, dans lesquelles l'entièreté du tissu de l'espace-temps est une sorte de maille en 3D de boucles entrelacées. Si les mailles étaient étires dans toutes les directions, on n'aurait aucune masse perceptible. L'espace-temps serait immense et froid. Par contre, si la maille était comprimée en une seule boucle (1 x 10^-33 cm), on ferait alors l'expérience de la "singularité". L'espace-temps serait microscopique et chaud.

Tout comme un "slinky", ces chenilles-jouet construites autour d'un ressort hélicoïdal, cet espace-temps s'étire, puis se contracte, avant de s'étirer à nouveau, et ce, éternellement (sans commencement ni fin).

C'est ainsi que les concepts comme "vous et moi", "nous et eux", et "ceci et cela" sont absolument et totalement insignifiants, en fin de compte. Ce sont des fictions grammaticales.

Mais il est malgré tout inutile d'invoquer la physique quantique pour expliquer le "non-soi" (l'interdépendance) Prenons ce qui nous appartient. Existe-t-il un quelconque test scientifique des propriétés physiques de cet objet qui pourrait démontrer qu'il est à nous? Non, car la propriété n'est qu'un concept légal. Cela s'applique à tout le reste, y-compris le corps physique. Il ne nous appartient nullement, en réalité et s'il n'est pas à nous, comment pourrait-il être nous? Il n'y a donc pas de moi, et ce moi n'est rien d'autre qu'un concept. Fort utile au demeurant, mais conceptuel néanmoins.

Certes, quoi que soit ce qui me donne cette impression de moi, elle doit dépendre de mon corps, car c'est lui qui se situe dans l'espace-temps. Mais s'il était réellement "à moi", je pourrais lui interdire de vieillir, de se détériorer, de grossir et de tomber malade. Il ne fait rien de ces choses que "je" voudrais qu'il fasse. Donc...