TROIS
Maître Joshu Jushin du district de Jo demanda au maître Nansen: Qu'arrive-t-il à une personne qui a reconnu l'existence? Où va-t-elle?
Maître Nansen répondit: Il va vivre dans la maison d'un bienfaiteur du temple face au portail d'entrée du temple et devient un buffle castré.
Joshu Jushin dit: Je remercie le maître pour les enseignements que je viens de recevoir.
Maître Nansen répondit: La nuit dernière, à minuit, la lune est entrée par ma fenêtre.
Commentaire de Nishijima rôshi:
Ce kôan commence de façon idéaliste par la question de maître Joshu sur le comportement d'une personne qui a reconnu la réalité. Il se peut que, à l'instar de nombreux de nos contemporains, il ait eu une vision idéalisée d'une telle personne: "Quel est le comportement des grands saints qui vivent dans la claire réalité sans obstacles? Quels miracles accomplissent-ils? Comment expriment-ils leur sublime sagesse?"
Maître Nansen refusait ces choses. Il a pris l'idée abstraite de Joshu et l'a appliquée à une situation très concrète et pratique. Maître Nansen se faisait vieux. Avant longtemps, la vie rigoureuse du temple pouvait se montrer trop dure pour lui. Où irait-il? Il irait chez un bienfaiteur du temple, pas trop loin où il mènerait la vie d'un "buffle castré", qui vit en paix et tranquille sans causer d'ennuis à quiconque. Où va une personne qui peut reconnaître la réalité? Que fait-elle? Elle fait tout simplement ce qu'exige la situation.
Joshu Jushin esprima sa gratitude pour les enseignements de son maître et le kôan se termine par la quatrième phase: la réalité elle-même. Maître Nansen y explique la simple merveille qu'est la réalité: le clair de lune qui luit par sa fenêtre tard la nuit. Toutes les situations comportent cette même beauté simple.
mercredi 7 octobre 2009
lundi 5 octobre 2009
Shinji Shôbôgenzô, le recueil de kôans de maître Dôgen
DEUX
Maître Obaku Ki-un du mont Obaku dans le district de Ko demanda au maître Hyakujo Ekai: Lorsque je voudrai partager avec d'autres les enseignements que vous nous avez donnés, comment devrais-je les enseigner?
Maître Hyakujo Ekai demeura assis sur son coussin sans rien dire.
Obaku Ki-un dit alors: Comment puis-je enseigner aux fils et aux petits-fils des disciples à l'avenir?
Maître Hyakujo Ekai répondit : Ce que vous venez de dire prouve que vous êtes quelqu'un de grand.
Commentaire de Gudo Nishijima rôshi
Ce kôan est similaire à l'histoire de Sakra Devanam Indra qui avait demandé au Bouddha "Comment puis-je protéger ceux et celles qui souhaitent pratiquer le Dharma?", ce à quoi le Bouddha avait répondu en demandant: "Pouvez-vous voir le Dharma que vous souhaitez protéger? Où est-il? Le désir de protéger le Dharma est pareil que celui de protéger l'espace. Les pratiquants bouddhistes protègent le Dharma et se protègent eux-mêmes en vivant dans la vérité."
La première question de maître Obaku était abstraite. Il voulait connaître la meilleure façon de transmettre le contenu intellectuel des enseignements de son maître. La réponse de Hyakujo fut semblable à celle du Bouddha, en plus direct. Il répondait en présentant sa propre pratique bouddhique, en restant assis en zazen.
Maître Obaku compris l'intérêt du comportement de son maître. Il posa donc une question plus concrète. Comment pourrait-il transmettre les enseignements aux gens du futur avec lesquels il n'aurait aucun contact direct. En réponse, maître Hyakujo lui dit simplement que sa (celle d'Obaku) compréhension des actions de son maître, de même que sa préoccupation pour les disciples futurs, montrait qu'il était un homme vivant dans la réalité.
Maître Hyakujo fut heureux de voir qu'Obaku pouvait passer du niveau de la philosophie abstraite à un niveau plus pratique et concret de préoccupation pour ses disciples et pour leurs descendants. Il n'eut plus de doute sur la capacité d'Obaku a résoudre son problème.
Maître Obaku Ki-un du mont Obaku dans le district de Ko demanda au maître Hyakujo Ekai: Lorsque je voudrai partager avec d'autres les enseignements que vous nous avez donnés, comment devrais-je les enseigner?
Maître Hyakujo Ekai demeura assis sur son coussin sans rien dire.
Obaku Ki-un dit alors: Comment puis-je enseigner aux fils et aux petits-fils des disciples à l'avenir?
Maître Hyakujo Ekai répondit : Ce que vous venez de dire prouve que vous êtes quelqu'un de grand.
Commentaire de Gudo Nishijima rôshi
Ce kôan est similaire à l'histoire de Sakra Devanam Indra qui avait demandé au Bouddha "Comment puis-je protéger ceux et celles qui souhaitent pratiquer le Dharma?", ce à quoi le Bouddha avait répondu en demandant: "Pouvez-vous voir le Dharma que vous souhaitez protéger? Où est-il? Le désir de protéger le Dharma est pareil que celui de protéger l'espace. Les pratiquants bouddhistes protègent le Dharma et se protègent eux-mêmes en vivant dans la vérité."
La première question de maître Obaku était abstraite. Il voulait connaître la meilleure façon de transmettre le contenu intellectuel des enseignements de son maître. La réponse de Hyakujo fut semblable à celle du Bouddha, en plus direct. Il répondait en présentant sa propre pratique bouddhique, en restant assis en zazen.
Maître Obaku compris l'intérêt du comportement de son maître. Il posa donc une question plus concrète. Comment pourrait-il transmettre les enseignements aux gens du futur avec lesquels il n'aurait aucun contact direct. En réponse, maître Hyakujo lui dit simplement que sa (celle d'Obaku) compréhension des actions de son maître, de même que sa préoccupation pour les disciples futurs, montrait qu'il était un homme vivant dans la réalité.
Maître Hyakujo fut heureux de voir qu'Obaku pouvait passer du niveau de la philosophie abstraite à un niveau plus pratique et concret de préoccupation pour ses disciples et pour leurs descendants. Il n'eut plus de doute sur la capacité d'Obaku a résoudre son problème.
vendredi 2 octobre 2009
Premier samedi du mois
Demain 3 octobre, premier samedi du mois.
Donc, pratique au 12 rue Doria à partir de 10 hres du matin.
On ne sera pas nombmreux...
Donc, pratique au 12 rue Doria à partir de 10 hres du matin.
On ne sera pas nombmreux...
jeudi 1 octobre 2009
Shinji Shôbôgenzô, le recueil des kôans de maître Dôgen
UN
Citation:
Un jour, maître Sekito Kisen rendit visite au maître Seigen Gyôshi du temple Jogo, sur le mont Seigen, dans le district de Ki. Maître Seigen lui demanda: D'où arrivez-vous?
Maître Sekito répondit: Du mont Sokei.
Maître Seigen (en empoignant son chasse-mouches) dit: Y a-t-il quelque chose de ce genre au mont Sokei?
Maître Sekito répondit: Non, pas au mont Sokei, ni même en Inde.
Maître Seigen dit: Vous n'avez jamais été en Inde, n'est-ce pas?
Maître Sekito répondit: Si j'allais en Inde, j'y trouverais un chasse-mouche tout comme le vôtre
Maître Seigen dit: Vous n'avez jamais été en Inde, vous devriez donc dire quelque chose en accord avec votre expérience.
Maître Sekito répondit: Le maître pourrait-il exprimer cela en deux ou trois mots concrets, au lieu de me laisser tout faire à moi, Kisen?
Maître Seigen dit: Ce n'est pas que je refuse de dire quelque chose pour vous, mais si je le faisais, vous ne seriez pas en mesure de toucher la cible par vous-même à l'avenir.
COMMENTAIRE de Nishijima rôshi
Maître Seigen Gyôshi était un disciple de maître Daikan Eno, le sixième patriarche de Chine, et Sekito Kisen devait devenir son disciple. Sekito arrivait du mont Sokei où avait vécu maître Daikan jusqu'à sa mort.Maître Seigen était assez fier de ses conférences sur le Bouddhisme et, en agitant son chasse-mouches, il demande à Sekito si les conférences du mont Sokei expliquaient le Bouddhisme aussi bien que les siennes. Le hossu, un chasse-mouches ornemental insigne des maîtres bouddhistes, est un symbole de la vérité bouddhique.
Dans sa réponse, maître Sekito se sert du hossu en tant que symbole concret des enseignements de maître Seigen. Il dit qu'il n'y nulle part d'enseignements qui soient tout à fait semblables à ceux de Seigen, ni là d'où il arrive, ni en Inde.
Maître Seigen fait remarquer que Sekito ne pouvait pas connaître l'Inde, vu qu'il n'y était jamais allé, mais Sekito rétorque qu'il est possible de trouver les mêmes enseignements en Inde, patrie du Bouddha.
Cependant, maître Seigen trouvait que cette réponse manquait de réalisme, et il dit que nous ne devrions parler qu'à partir de notre expérience personnelle.
Maître Sekito s'est senti un peu sans voix quant à une réponse satisfaisante, et a demandé au maître de l'aider.
Enfin, maître Seigen Gyôshi lui dit que cela lui serait facile, mais que le faire priverait Sekito de l'opportunité d'exprimer sa propre vérité.
La structure de l'histoire contient quatre points de vue différents. Le premier est le point de vue idéaliste ou intellectuel, représenté par la question de maître Seigen sur les conférences bouddhiques, symbolisées par le chasse-mouches.
Dans le second point de vue, Sekito considère les choses d'un point de vue matérialiste: le hossu --- le hossu physique réel que tient maître Seigen --- n'existe qu'à ce seul endroit, pas en Inde ni à Sokei.
Maître Seigen n'est pas satisfait et veut entendre quelque chose de plus réaliste. Il savait que Sekito n'avait jamais été en Inde, il lui demande donc de parler d'expérience, et pas de suppositions. Du point de vue ultime, maître Seigen savait que Sekito devrait apprendre comment exprimer sa propre vérité. C'était là quelque chose que personne ne pourrait faire à sa place.
Citation:
Un jour, maître Sekito Kisen rendit visite au maître Seigen Gyôshi du temple Jogo, sur le mont Seigen, dans le district de Ki. Maître Seigen lui demanda: D'où arrivez-vous?
Maître Sekito répondit: Du mont Sokei.
Maître Seigen (en empoignant son chasse-mouches) dit: Y a-t-il quelque chose de ce genre au mont Sokei?
Maître Sekito répondit: Non, pas au mont Sokei, ni même en Inde.
Maître Seigen dit: Vous n'avez jamais été en Inde, n'est-ce pas?
Maître Sekito répondit: Si j'allais en Inde, j'y trouverais un chasse-mouche tout comme le vôtre
Maître Seigen dit: Vous n'avez jamais été en Inde, vous devriez donc dire quelque chose en accord avec votre expérience.
Maître Sekito répondit: Le maître pourrait-il exprimer cela en deux ou trois mots concrets, au lieu de me laisser tout faire à moi, Kisen?
Maître Seigen dit: Ce n'est pas que je refuse de dire quelque chose pour vous, mais si je le faisais, vous ne seriez pas en mesure de toucher la cible par vous-même à l'avenir.
COMMENTAIRE de Nishijima rôshi
Maître Seigen Gyôshi était un disciple de maître Daikan Eno, le sixième patriarche de Chine, et Sekito Kisen devait devenir son disciple. Sekito arrivait du mont Sokei où avait vécu maître Daikan jusqu'à sa mort.Maître Seigen était assez fier de ses conférences sur le Bouddhisme et, en agitant son chasse-mouches, il demande à Sekito si les conférences du mont Sokei expliquaient le Bouddhisme aussi bien que les siennes. Le hossu, un chasse-mouches ornemental insigne des maîtres bouddhistes, est un symbole de la vérité bouddhique.
Dans sa réponse, maître Sekito se sert du hossu en tant que symbole concret des enseignements de maître Seigen. Il dit qu'il n'y nulle part d'enseignements qui soient tout à fait semblables à ceux de Seigen, ni là d'où il arrive, ni en Inde.
Maître Seigen fait remarquer que Sekito ne pouvait pas connaître l'Inde, vu qu'il n'y était jamais allé, mais Sekito rétorque qu'il est possible de trouver les mêmes enseignements en Inde, patrie du Bouddha.
Cependant, maître Seigen trouvait que cette réponse manquait de réalisme, et il dit que nous ne devrions parler qu'à partir de notre expérience personnelle.
Maître Sekito s'est senti un peu sans voix quant à une réponse satisfaisante, et a demandé au maître de l'aider.
Enfin, maître Seigen Gyôshi lui dit que cela lui serait facile, mais que le faire priverait Sekito de l'opportunité d'exprimer sa propre vérité.
La structure de l'histoire contient quatre points de vue différents. Le premier est le point de vue idéaliste ou intellectuel, représenté par la question de maître Seigen sur les conférences bouddhiques, symbolisées par le chasse-mouches.
Dans le second point de vue, Sekito considère les choses d'un point de vue matérialiste: le hossu --- le hossu physique réel que tient maître Seigen --- n'existe qu'à ce seul endroit, pas en Inde ni à Sokei.
Maître Seigen n'est pas satisfait et veut entendre quelque chose de plus réaliste. Il savait que Sekito n'avait jamais été en Inde, il lui demande donc de parler d'expérience, et pas de suppositions. Du point de vue ultime, maître Seigen savait que Sekito devrait apprendre comment exprimer sa propre vérité. C'était là quelque chose que personne ne pourrait faire à sa place.
lundi 28 septembre 2009
Dogen Sangha à Bordeaux
Un de mes amis, actuellement étudiant à Bordeaux, m'a proposé d'organiser un petit groupe d'étude et de pratique à Bordeaux, selon les enseignements de Nishijima rôshi.
S'il en est qui lisent de forum et qui pourraient être intéressés, qu'ils me le fassent savoir.
Merci
mxl
S'il en est qui lisent de forum et qui pourraient être intéressés, qu'ils me le fassent savoir.
Merci
mxl
samedi 19 septembre 2009
Shinji Shôbôgenzô
N'ayant pas grand chose à raconter, je vais vous mettre en ligne des kôans du recueil de maître Dôgen, en commençant par les introductions de Michael Eido Luetchford et de Gudo Nishijima rôshi.
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Shôbôgenzô signifie "Le Trésor de l'Oeil droit du Dharma". Ne cherchez pas l'Oeil gauche... Plutôt, l'Oeil correct du Dharma... Bon, Shinji signifie "original (ou vrai) caractère (d'écriture)"., c'est-à-dire les caractères chinois dans lesquels le livre est écrit. On le connaît aussi comme "Shôbôgenzô en trois-cents histoires" et aussi Mana Shôbôgenzô, mana étant une lecture alternative à shinji.
Il s'agit d'une collection de trois cents un de ces mondo (questions-réponses, discussions) en chinois que l'on appelle habituellement koans, ces historiettes qui décrivent les conversations et les actions des anciens maîtres bouddhistes.
Compilés au XIII° siècle par maître Dôgen, le fondateur de l'école japonaise Sôtô du Bouddhisme zen, l'un des plus brillants philosophes de l'histoire du Japon, ces trois-cents un koans se répartissent en trois sections ou "livres", deux de cent kôans et l'un de cent-un. Au départ, son titre était simplement "Shôbôgenzô", tout comme l'oeuvre monumental de Dôgen en japonais, mais il semble qu'on ait ajouté "Shinji" par la suite, pour le distinguer de l'autre.
Ses origines sont assez obscures et sont encore un sujet de recherches universitaires. Longtemps, plusieurs siècles même, on a contesté l'attribution du recueil et de fait, jusqu'en 1934, la seule version disponible en était un commentaire par maître Shigetsu Ein daté aux environs de la moitié du XVII° siècle, Nentei Sambyakusoku Funogo. C'est alors qu'on fit une importante découverte dans les archives médiévales de Kanagawa, en 1934. On y trouva une copie de l'un des trois volumes du Shinji Shôbôgenzô, datée de 1288, ce qui démontrait que le livre existait peu de temps après le décès de maître Dôgen en 1253. De plus, les récits eux-mêmes ont une grande ressemblance avec leurs citations dans le Shôbôgenzô en japonais de maître Dôgen.
Aujourd'hui, la majorité des spécialistes du Bouddhisme se sont rangés à l'attribution à maître Dôgen. Sa date de compilation est toujours contestée, mais on a de fortes raisons de penser que maître Dôgen avait au moins commencé à le compiler dès son séjour au Kenninji, avant même son départ pour la Chine, peut-être en tant que documents de référence pour ses études.
Il existe plusieurs divergences sur les liens entre les textes d'époque Song d'où proviennent ces récits (y-compris le Keitoku Dentoroku, le Shumon Toyoshu, l'Engo Koroku, le Wanshi Goroku, etc.) ainsi que sur la nature de la relation entre les deux Shôbôgenzôs de maître Dôgen. Cependant, il semble évident qu'il s'est servi de cette collection de kôans comme source pour ses conférences et ses écrits. Alors que dans le Shinji Shôbôgenzô, ces kôans sont transcrits sans commentaire, dans son chef-d'oeuvre, le Shôbôgenzô en japonais, ainsi que dans le recueil de ses conférences, le Eihei Koroku, Dôgen fait constamment référence à plusieurs de ces récits : il les commente, les interprète et même les déconstruit et les reconstruit au gré de son propos didactique.
Le fait que maître Dôgen décrivait ces mondo comme kosoku (critères ancestraux) ou innen (causes et effets) est significatif : il ne les appelait pas des kôans. Il n'utilisait ce mot que pour signifier le Dharma ou l'Univers dans lequel nous vivons, comme dans le Shôbôgenzô Genjôkôan (L'Univers réalisé), usage qui diffère totalement de celui de l'école Rinzaï. Il s'en sert dans tous ses textes pour examiner et expliquer les enseignements bouddhistes ainsi que le système logique du Bouddhisme. Cependant, il reste important de noter que nulle part dans tout son oeuvre, maître Dôgen ne conseille de les utiliser au cours de la pratique de Zazen.
(D'après Michael Eido Luetchford et Jeremy Pearson).
_________________
Toutes les idées de maître Dôgen sont exprimées selon une structure en quatre phases. Tout d'abord, il exprime un problème sous un angle idéaliste, autrement dit, une idée se servant de concepts abstraits. Immédiatement après, il explique le même problème, mais cette fois sous un angle objectif, ou matérialiste. Autrement dit, il donne des exemples concrets et des faits. Puis, dans un troisième temps, il exprime le problème sous l'angle d'un problème réel, c'est-à-dire sous celui de l'action.
Evidemment, il ne peut pas expliquer parfaitement la réalité du problème grâce à des mots dans un livre, mais il le fait en rapprochant le point de vue subjectif qu'il présente d'abord et le second point de vue objectif. Il en fait une synthèse qui est une évaluation réaliste basée sur la philosophie de l'action, qui dit que dans l'action, qui est une synthèse du soi et du monde extérieur. Et à la fin, il tente de suggérer la nature subtile et ineffable de la réalité elle-même en recourant à un discours symbolique, poétique ou figuratif.
Le Shôbôgenzô est rempli de ces explications à quatre temps. Même les chapitres peuvent se répartir selon ces quatre groupes: théorique, objectif, réaliste et figuratif/poétique. Le contenu des chapitres l'est de même et même souvent les paragraphes.
La lecture du Shôbôgenzô est difficile car il semble regorger de contradictions logiques. Mais cela est dû à cette utilisation en quatre étapes, car les points de vue subjectif et objectif sont toujours contradictoires, et une explication réaliste parait toujours contredire les deux précédents.
Ces histoires du Shinji Shôbôgenzô sont construites sur la même structure. Ce sont des histoires très réalistes, qui servaient à enseigner les principes fondamentaux du Bouddhisme. Elles n'ont rien de mystique ou d'incompréhensible: elles sont la façon qu'ont les maîtres de nous indiquer la réalité.
(D'après Gudô Nishijima rôshi)
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Shôbôgenzô signifie "Le Trésor de l'Oeil droit du Dharma". Ne cherchez pas l'Oeil gauche... Plutôt, l'Oeil correct du Dharma... Bon, Shinji signifie "original (ou vrai) caractère (d'écriture)"., c'est-à-dire les caractères chinois dans lesquels le livre est écrit. On le connaît aussi comme "Shôbôgenzô en trois-cents histoires" et aussi Mana Shôbôgenzô, mana étant une lecture alternative à shinji.
Il s'agit d'une collection de trois cents un de ces mondo (questions-réponses, discussions) en chinois que l'on appelle habituellement koans, ces historiettes qui décrivent les conversations et les actions des anciens maîtres bouddhistes.
Compilés au XIII° siècle par maître Dôgen, le fondateur de l'école japonaise Sôtô du Bouddhisme zen, l'un des plus brillants philosophes de l'histoire du Japon, ces trois-cents un koans se répartissent en trois sections ou "livres", deux de cent kôans et l'un de cent-un. Au départ, son titre était simplement "Shôbôgenzô", tout comme l'oeuvre monumental de Dôgen en japonais, mais il semble qu'on ait ajouté "Shinji" par la suite, pour le distinguer de l'autre.
Ses origines sont assez obscures et sont encore un sujet de recherches universitaires. Longtemps, plusieurs siècles même, on a contesté l'attribution du recueil et de fait, jusqu'en 1934, la seule version disponible en était un commentaire par maître Shigetsu Ein daté aux environs de la moitié du XVII° siècle, Nentei Sambyakusoku Funogo. C'est alors qu'on fit une importante découverte dans les archives médiévales de Kanagawa, en 1934. On y trouva une copie de l'un des trois volumes du Shinji Shôbôgenzô, datée de 1288, ce qui démontrait que le livre existait peu de temps après le décès de maître Dôgen en 1253. De plus, les récits eux-mêmes ont une grande ressemblance avec leurs citations dans le Shôbôgenzô en japonais de maître Dôgen.
Aujourd'hui, la majorité des spécialistes du Bouddhisme se sont rangés à l'attribution à maître Dôgen. Sa date de compilation est toujours contestée, mais on a de fortes raisons de penser que maître Dôgen avait au moins commencé à le compiler dès son séjour au Kenninji, avant même son départ pour la Chine, peut-être en tant que documents de référence pour ses études.
Il existe plusieurs divergences sur les liens entre les textes d'époque Song d'où proviennent ces récits (y-compris le Keitoku Dentoroku, le Shumon Toyoshu, l'Engo Koroku, le Wanshi Goroku, etc.) ainsi que sur la nature de la relation entre les deux Shôbôgenzôs de maître Dôgen. Cependant, il semble évident qu'il s'est servi de cette collection de kôans comme source pour ses conférences et ses écrits. Alors que dans le Shinji Shôbôgenzô, ces kôans sont transcrits sans commentaire, dans son chef-d'oeuvre, le Shôbôgenzô en japonais, ainsi que dans le recueil de ses conférences, le Eihei Koroku, Dôgen fait constamment référence à plusieurs de ces récits : il les commente, les interprète et même les déconstruit et les reconstruit au gré de son propos didactique.
Le fait que maître Dôgen décrivait ces mondo comme kosoku (critères ancestraux) ou innen (causes et effets) est significatif : il ne les appelait pas des kôans. Il n'utilisait ce mot que pour signifier le Dharma ou l'Univers dans lequel nous vivons, comme dans le Shôbôgenzô Genjôkôan (L'Univers réalisé), usage qui diffère totalement de celui de l'école Rinzaï. Il s'en sert dans tous ses textes pour examiner et expliquer les enseignements bouddhistes ainsi que le système logique du Bouddhisme. Cependant, il reste important de noter que nulle part dans tout son oeuvre, maître Dôgen ne conseille de les utiliser au cours de la pratique de Zazen.
(D'après Michael Eido Luetchford et Jeremy Pearson).
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Toutes les idées de maître Dôgen sont exprimées selon une structure en quatre phases. Tout d'abord, il exprime un problème sous un angle idéaliste, autrement dit, une idée se servant de concepts abstraits. Immédiatement après, il explique le même problème, mais cette fois sous un angle objectif, ou matérialiste. Autrement dit, il donne des exemples concrets et des faits. Puis, dans un troisième temps, il exprime le problème sous l'angle d'un problème réel, c'est-à-dire sous celui de l'action.
Evidemment, il ne peut pas expliquer parfaitement la réalité du problème grâce à des mots dans un livre, mais il le fait en rapprochant le point de vue subjectif qu'il présente d'abord et le second point de vue objectif. Il en fait une synthèse qui est une évaluation réaliste basée sur la philosophie de l'action, qui dit que dans l'action, qui est une synthèse du soi et du monde extérieur. Et à la fin, il tente de suggérer la nature subtile et ineffable de la réalité elle-même en recourant à un discours symbolique, poétique ou figuratif.
Le Shôbôgenzô est rempli de ces explications à quatre temps. Même les chapitres peuvent se répartir selon ces quatre groupes: théorique, objectif, réaliste et figuratif/poétique. Le contenu des chapitres l'est de même et même souvent les paragraphes.
La lecture du Shôbôgenzô est difficile car il semble regorger de contradictions logiques. Mais cela est dû à cette utilisation en quatre étapes, car les points de vue subjectif et objectif sont toujours contradictoires, et une explication réaliste parait toujours contredire les deux précédents.
Ces histoires du Shinji Shôbôgenzô sont construites sur la même structure. Ce sont des histoires très réalistes, qui servaient à enseigner les principes fondamentaux du Bouddhisme. Elles n'ont rien de mystique ou d'incompréhensible: elles sont la façon qu'ont les maîtres de nous indiquer la réalité.
(D'après Gudô Nishijima rôshi)
mardi 1 septembre 2009
s'amuser à faire des étincelles avec du silex
L'autre jour, à Francfort, lors de la sesshin, Brad Warner a cité ce passage de maître Dôgen où celui-ci dissuade ses disciples de s'amuser à faire des étincelles avec des silex. Le silex étant cette variété de pierre qui équipe les briquets, ce qui permet d'enflammer la mèche (pour les briquets antiques et les zippo à essence) ou le gaz (pour les briquets modernes), il semble qu'au treizième siècle, certains trouvaient cette caractéristique assez étonnante pour s'en faire un jeu.
Quoique.
J'ai déjà vu des enfants s'amuser inlassablement à allumer un briquet, voire à faire des étincelles quand il n'y a plus de gaz...
La réflexion qui lui est venue, est qu'aujourd'hui, Dôgen dirait de ne pas s'amuser sur une console (playstation ou autre), en poursuivant sa réflexion sur le fait qu'après tout, dans une playstation, ce sont en définitive des étincelles qu'on retrouve derrière le fonctionnement de l'écran. Et comme le silicium tire justement son nom du silex qui est une pierre de silice, voilà la boucle bouclée.
Nos plus grandes distractions contemporaines (et je m'y inclus) sont des étincelles faites avec du silex!!! ...
Si nous sommes sérieux dans la pratique de la Voie, nous devons faire attention à ce problème. L'ordinateur, le téléphone portable, les consoles de jeu ne sont, au bout du compte que des étincelles faites avec du silex et nous sommes comme hypnotisés par elles, elles nous bouffent un temps fou, nous empêchent de faire notre travail, d'aller faire du sport, de faire un peu d'exercice, d'aller au spectacle, de lire de vrais livres (en papier avec des caractères imprimés et tout et tout!) et aussi de nous asseoir, ne fut-ce que 10 minables minutes face à un mur, face à nous mêmes. Ne pouvons-nous y réfléchir et voir que nous tendons à nous laisser asservir avec plus de solidité que par la plus lourde des chaînes?
Allez hop! Au zafu!
Quoique.
J'ai déjà vu des enfants s'amuser inlassablement à allumer un briquet, voire à faire des étincelles quand il n'y a plus de gaz...
La réflexion qui lui est venue, est qu'aujourd'hui, Dôgen dirait de ne pas s'amuser sur une console (playstation ou autre), en poursuivant sa réflexion sur le fait qu'après tout, dans une playstation, ce sont en définitive des étincelles qu'on retrouve derrière le fonctionnement de l'écran. Et comme le silicium tire justement son nom du silex qui est une pierre de silice, voilà la boucle bouclée.
Nos plus grandes distractions contemporaines (et je m'y inclus) sont des étincelles faites avec du silex!!! ...
Si nous sommes sérieux dans la pratique de la Voie, nous devons faire attention à ce problème. L'ordinateur, le téléphone portable, les consoles de jeu ne sont, au bout du compte que des étincelles faites avec du silex et nous sommes comme hypnotisés par elles, elles nous bouffent un temps fou, nous empêchent de faire notre travail, d'aller faire du sport, de faire un peu d'exercice, d'aller au spectacle, de lire de vrais livres (en papier avec des caractères imprimés et tout et tout!) et aussi de nous asseoir, ne fut-ce que 10 minables minutes face à un mur, face à nous mêmes. Ne pouvons-nous y réfléchir et voir que nous tendons à nous laisser asservir avec plus de solidité que par la plus lourde des chaînes?
Allez hop! Au zafu!
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