vendredi 9 janvier 2009

Bonne année

Bonne année à tous, et meilleurs voeux, même et surtout si les perspectives s'annoncent plutôt sombres.

Nous avons repris nos pratiques hebdomadaires le jeudi soir à 19hres 30, au 12 de la rue Doria, près des Arceaux à Montpellier.

Il y aura une matinée de pratique le samedi 17 janvier, chez Philippe (me contacter pour tout renseignement) et une journée de zazen ici (12 rue Doria) le 31 janvier.

Il semble que, dans certains groupes, on tende à considérer que fréquenter le dojo un enseignant quelconque ait valeur d'engagement envers le dit enseignant. Avec pour effet que les membres d'un dojo tendent à considérer les autres avec suspicion, s'ils ne sont pas de leur chapelle.

Je tiens pour cela à rappeler à tous qu'avant de se choisir un enseignant, la tradition veut qu'on en fréquente beaucoup. C'est important pour ne pas se fourvoyer. A cet égard, je n'ai aucune prétention et je ne voudrais pas, comme je le disais à quelqu'un hier, qu'on en vienne à croire une telle chose à mon propos. Soyez donc circonspects. On fréquente un groupe ou un dojo pour des raisons de proximité géographique, le plus souvent: cela ne doit pas devenir une entrave.

Mxl

samedi 31 mai 2008

Les "moyens habiles"

Dans la même veine que précédemment, Brad Warner s'est attaqué au concept de "moyens habiles" si trop souvent détourné par trop tant de gens pour justifier leurs sottises au prétexte de "moyens habiles". Voici ce qu'en dit un commentateur de son blogue:

"'Moyens habiles' n'est à mon avis qu'un terme utilisé par des personnes qui n'ont fait qu'entendre parler de, ou qui ont vu les événements.

"Le concept a beaucoup de défauts.

"Il implique des causes et des effets là il n'y en avait peut-être pas.

"Il implique un plan machiavélique là où il n'y en avait peut-être pas non plus.

"L''instigateur' de ces 'moyens habiles' ne les considérait peut-être pas comme étant quoi que ce soit - à part peut-être 'exposer ce qui est évident' ou 'agir spontanément dans l'instant'.

"Un type se promène, se prend les pieds dans une racine et se tape la tête contre un tronc d'arbre. Un fruit mur tombe par terre. Toute le monde fait l'éloge du type pour avoir fait usage de 'moyens habiles pour récolter le fruit. Personne ne remarque la part de l'arbre dans les faits.

"En attendant, plein de sots vont répétant ces 'moyens habiles' et se tapent la tête contre des arbres qui n'ont pas de fruits en pensant qu'il s'agit d'une sorte de magie qui fait tomber des fruits murs par terre. Certes, si on se tape la tête contre suffisamment d'arbres de façon aléatoire, quelque chose pourrait finir par se passer mais le mal de crâne va être terrible..."

mardi 27 mai 2008

"mindfulness" bis

Le terme anglais "Mindfulness" qui est souvent traduit par "pleine conscience" en est un qui a été récupéré par des bouddhistes new-age et emprunté à la psychologie pop. Cette "pleine conscience" est une gêne, pas un avantage. Elle impliquerait que toute action soit le résultat d'un plan prémédité. Au delà de cela, cette action serait prévue pour obtenir une certaine réaction.

Selon la psychologie de la conscience, si on a une mentalité qui juge, lorsqu'on est stressé, on réagit par la colère, la frustration, l'agressivité ou l'hostilité. Et ce comportement agressif ne fait qu'aider quiconque ou quoi que ce soit crée du stress à cet instant-là.

L'opposé de cette conscience pourrait être l'inclination naturelle. Si on a une inclination naturelle à l'avidité et l'égoïsme, on peut alors, avec le temps, mitiger ces comportements destructeurs soit par la psycho clinique, soit l'aide d'un sangha bouddhiste calme et posé. Le comportement imitatif est un puissant outil d'enseignement. Ce qui fait que, lorsque l'élève comprend le processus mental du maître (modèle) on arrive à un palier d'éveil.

Maître Nishijima enseigne que le Bouddhisme n'est pas une affaire intellectuelle. Dans son livre, "Face au vrai dragon", il en parle pas mal. Il y a l'esprit, il y a la matière, il y a l'esprit et la matière qui se rencontrent dans l'action et puis, il y a le fait d'aller au-delà de l'action dans ce qu'il appelle "l'ineffable réalité." C'est de ce dernier bout que parle le Bouddhisme. Dans ce contexte, la "conscience" est au mieux la première étape, et au pire une déviation dans la direction la plus mauvaise possible.

Un autre commentateur de Brad faisait remarquer ceci:

"La différence entre 'mindfulness' et 'attention' est aussi grande que celle entre la 'glande pénale' et la 'glande pinéale'.

"Autre exemple: Dans (l'Ancien Testament), le cantique de Deborah (Juges 5:17), "Dan demeurait dans des navires." Mais à la lumière de la langue ugaritique, parente de l'hébreux, on traduit maintenant "Dan demeurait à l'aise."

"Se reposer est assez différent de rester sur un bateau, en particulier pour une tribu qui n'en a pas...

"Passé - présent - futur.

"S'occuper de l'instant (l'attention au présent) est différent de planifier pour le futur (organiser une action dans le but d'obtenir une réaction)."

dimanche 25 mai 2008

L'attention ("mindfulness")

Je vous mets ici la traduction du dernier post de maître Nishijima. C'est au sujet d'un concept anglophone assez difficile à rendre en français, "mindfulness", qui signifie "prêter attention", "être attentif", "être soigneux", "se souvenir de". Il est souvent employé dans certaines branches du Bouddhisme. Mais voici ce qu'en pense Nishijima:

http://gudoblog-e.blogspot.com/

Samedi 24 mai 2008
Sur l'attention

Chers membres du Dogen Sangha International et des groupes Dogen Sangha!

Ce matin, j'ai reçu une très importante question sur l'attention ("Mindfulness") de la part du Vén. Hanrei Banzan, d'Irlande, et je lui ai déjà répondu sur le Blogue, mais je pense qu'il s'agit d'un sujet très important pour le Bouddhisme. En effet, de nombreuses personnes qui ne comprennent pas le Bouddhisme dans son sens véritable croient cette idée d'"attention" très importante pour comprendre le Bouddhisme. Je crois au contraire que cette interprétation est porteuse de dangereux contresens. C'est pourquoi je pense depuis longtemps que nous, vrais bouddhistes, devons comprendre le sens véritable de "l'attention" et ne jamais croire qu'elle soit le Bouddhisme, car nous pourrions en faire une sorte de philosophie idéaliste et donc, une révérence exclusive de l'attention ne peut en aucun cas être une pensée bouddhique, mais simplement idéaliste.

C'est pourquoi j'ai envoyé cette réponse ce matin au Vén. Hanrei Banzan. Et comme je la crois très importante pour une compréhension exacte du Bouddhisme, je vous la fais aussi parvenir.

Blogger HezB said...

Cher Roshi,

En Occident, diverses sources bouddhistes nous parlent beaucoup de "mindfulness". On considère très largement que c'est une pratique bouddhique qui cherche à mener nos tâches quotidiennes avec une attention sans faille, qui pourrait être semblable à "l'unicité de concentration" développée dans certains types de méditation.

Qu'en pensez-vous?

Merci et considérations,

Hanrei.
10:32 PM, May 23, 2008
Blogger GUDO NISHIJIMA said...

Cher Ven. Hanrei San,

Merci beaucoup de me signaler ce dangereux concept de "mindfulness."

Je pense que le mot "mindfulness" signifie l'état d'esprit où on est très attentif à la fonction mentale.

Ce mot pourrait donc être en profonde relation avec la philosophie idéaliste.

Cependant, depuis quelque temps, de prétendus enseignants bouddhistes insistent sur l'importance de ce concept. Ce qui pourrait vouloir dire que le Bouddhisme est une sorte de philosophie idéaliste.

Donc, j'ai bien peur qu'il s'agirait là d'un méconception sur le Bouddhisme.

Nous ne devons jamais oublier que ce dernier n'est en rien une philosophie idéaliste, et que si quelqu'un, dans le Bouddhisme, révère la "mindfulness", il ne peut en aucun cas être bouddhiste.

Gudo Wafu Nishijima
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On reconnaît bien là le langage abrupt et sans concessions de maître Nishijima. C'est pourquoi j'y adjoins le commentaire qu'en fait Brad Warner:

"Je suis si heureux que Nishijima Roshi ait posté ceci sur l'attention. (...) J'en ai tellement marre de ce truc que c'est merveilleux de constater que quelqu'un d'autre pense pareil. Et non, nous n'en avons jamais parlé ensemble.

"J'ai dit il y a peu que je voulais détruire tout ce culte de l'attention qui se développe dans le Bouddhisme de nos jours. Comme le fait remarquer Nishijima, le mot "attention" en est venu à signifier s'enfoncer de plus en plus profondément dans notre propre tête, et ce n'est absolument pas ça, le Bouddhisme. Je pense que j'ai déjà dû me répandre là-dessus. Mais je vis dans un centre de méditation où de nombreux enseignants font leur truc. Je ne pourrais dire combien de fois je me suis retrouvé dans ma chambre à écouter quelqu'un gloser sur l'attention, et sortir, une fois que c'est fini, pour constater qu'ils ont laissé la porte déverrouillée, les fenêtres grandes ouvertes, les chaises dispersées tout partout... Mais quelle sorte de putain d'attention est-ce qu'ils étudient là?"

jeudi 10 avril 2008

Coopération

Le XX° siècle passé a été un siècle de soubresauts. La Grande Guerre et son immonde boucherie où, comme l'écrivait Brel dans "Jaurès", (les pauvres soldats allaient) "offrir aux Champs d'Horreur leurs vingt ans qui n'avaient pu naître," "aux ordres de quelques sabreurs qui (l')exigeaient du bout des lèvres", a été le résultat paroxystique de la vieille mentalité autoritaire et pyramidale, héritée de nos lointains ancêtres animaux sociaux et toujours d'actualité chez les loups, les rats et bien d'autres. La réaction immédiate de l'après-guerre, les "années folles", a aussi été une tentative de s'affranchir de ce "même" de l'autoritarisme.
Mais la liberté ne s'improvise pas si facilement, et les mêmes savent se défendre. D'où la montée du fascisme dans les années '30. La Libération, vu les dommages de la guerre, n'a pourtant pas pu être une libération de l'autoritarisme, juste de sa forme paroxystique, le fascisme.
C'est ainsi qu'avril et mai 1968.
Mais, comme je l'observais déjà à l'époque, les autoritaires ne sont jamais loin, lorsqu'une vacance de pouvoir se déclare. Et ils savent très bien se déguiser sous le discours de la liberté. Dès 1973, avec le coup d'état du Chili, ils se sont mis à l'oeuvre à l'Ouest (alors que leurs collègues "communistes" de l'Est venaient de régler le problème tchèque dans les mêmes termes) et leur idéologie n'a cessé de s'imposer depuis jusqu'à la situation actuelle, où ce qu'on appelle "la gauche" n'a rien à proposer d'autre qu'une autre forme d'autoritarisme.
C'est sans doute pour cela qu'on les entend si peu à propos de la Chine et du Tibet.

Mais toute l'évolution de l'Humanité a été ponctuée d'un pareil parcours en accordéon. Toutes les avancées de l'Humanité se sont faite par l'entraide, la coopération, le mutualisme. Ces choses sont basées sur le don gratuit. Rien qui puisse intéresser un néo-libéral. Comment? Des gens sont prêts à saboter la liberté d'arnaquer son prochain en donnant librement ce qui pourrait être vendu? La voilà la subversion!
Le principe coopératif ne se retrouve que chez les animaux les plus évolués: grands singes, éléphants, cétacés. En tant que grands singes, nous avons poussé ce principe encore plus loin. Il permet de tempérer les effets contre-productifs d'une hiérarchie trop rigide (voir le principe du mouton de Panurge où, si le chef fait une grosse bêtise, tout le monde suit le chef). Il permet d'améliorer son propre bien-être en améliorant celui de tous. Il permet de vivre plus serein parce qu'un monde fondé sur la confiance et le don est moins stressant qu'un monde de méfiance et d'arnaque. Il y a des cultures, y-compris parmi nous, où arnaquer son meilleur ami est une espèce de sport, mais les gens qui en participent ne me frappent pas comme faisant preuve d'un très grand équilibre psychique.

Etre généreux n'est guère évident, cela nécessite même souvent un grand effort sur soi-même, du même ordre que celui qui consisterait à ne pas bouger alors qu'on est en danger de mort. Mais il nous permet de vivre mieux et plus heureux.

jeudi 27 mars 2008

Authenticité

En vérifiant le référencement de mon site, j'ai tapé zen et montpellier, et suis tombé sur un titre qui décrit le dojo zen de mon "oncle" Kosen, rue Bourrely à Chaptal, comme le "seul dojo zen authentique" de Montpellier. Il est vrai que mon autre "oncle", Yuno Who, a lui aussi, récemment, ouvert un groupe de pratique certifié AZI, à Figuerolles.

Si je les appelle "mes oncles", soit dit entre parenthèses, c'est qu'ils ont reçu la transmission de Niwa Zenji, qui lui même l'avait donnée à maître Nishijima dont je l'ai reçue. La tradition zen voulant que l'on tienne le maître transmetteur comme son ancêtre direct, Rempo Niwa serait donc ainsi mon "grand-père". Mais je sais que Kosen renie cette transmission, ne lui accordant qu'un rôle de relais pour Deshimaru. Je ne sais ce qu'en prétend Yuno Who, ce qui est sûr, c'est que ce n'est pas lui en personne qui dirige son groupe de Montpellier.

Si je voulais entrer dans cette logique perverse, je devrais moi aussi renchérir sur l'"authenticité" et affirmer que moi seul, évidemment, suis un maître zen authentique à Montpellier, ayant reçu la transmission face à face, de maître zen à maître zen, dans une transmission authentique de personnes se connaissant personnellement.

A quoi bon?

Ceux et celles qui recherchent quelqu'un pour assumer la responsabilité à leur place, quelqu'un qui pourra faire le parcours à leur place, quelqu'un qui, d'un coup de baguette magique, les transformera en quelque chose d'autre que ce qu'ils sont et qui ne les satisfait pas, bref, ceux et celles qui cherchent un "maître" dans le rapport de maître à esclave, ne venez pas me faire perdre mon temps.

Je n'accepterai que des apprentis pour qui je n'essaierai d'être qu'un maître d'apprentissage. Toute autre solution me fatiguerait.

Mxl

dimanche 23 mars 2008

Bodhisattva vs bhikkhu

Ce matin, j'entendais l'excellent Dominique Trottignon, directeur de l'Université Bouddhique Européenne, faire la distinction entre la voie du bhikkhu et celle du bodhisattva, en disant que le premier s'attelait à reproduire la vie du Bouddha après son éveil et, pour le second, avant son éveil. Et donc que le bhikkhu s'attachait à éviter tout ce qui pourrait entraver son éveil, alors que le bodhisattva s'attachait à recréer tout ce qui pourrait le favoriser.

Certes, une telle vision est schématique, et je serais surpris que D. Trottignon pense réellement différemment de moi, mais il me semble bien que les deux soient nécessaires. Le Bouddha dit (et c'est vrai) qu'il a progressé seul sur sa voie. Mais il a eu une vie civile, avant, voire des vies antérieures qu'il mentionne, et au cours de cette vie antérieure à son éveil, il a suivi les enseignements de plusieurs maîtres avant de s'en détacher. Mais il est évident que ces enseignements lui ont servi, fut-ce a contrario.

Nous progressons tous seuls. Personne ne peut faire le trajet à notre place. Personne ne peut nous enseigner quoi que ce soit. La plupart des gens sont de toute façon sourds à tout conseil. J'ai choisi pour maître (entendez "enseignant") un vieux monsieur qui habite à des milliers de kilomètres de chez moi. Il est évident que son enseignement risquerait d'être assez succint en ce qui a trait aux choses quotidiennes. Mais j'ai résolu de tendre tous mes efforts afin que toutes les personnes et toutes les choses que je rencontre me soient un maître.

Lorsque j'ai rédigé la biographie de Scott Ross, un de ses anciens élèves m'a dit: "C'était un très mauvais maître, mais moi, j'étais un excellent élève". En fait, il vaut mieux être un bon élève, même avec un mauvais maître, que le contraire. Certes, un bon maître et un bon élève, c'est idéal. Mais même avec un bon maître, une absence (physique ou autre) pourra entraîner un manque.

Dans les métiers traditionnels, les maîtres d'apprentissage enseignent par l'exemple à leurs apprentis. Mais dans tout métier, il y a des techniques qui servent souvent, et d'autres qui servent rarement. L'apprenti apprendra celles qui servent souvent, et risquera de ne pas connaître les plus rares. S'il n'a pas développé la capacité d'extrapoler, de "réinventer", son bagage technique s'appauvrira et il ne transmettra à son tour qu'un métier appauvri. C'est ainsi que, souvent, les avancées techniques sont le fait de réinventions, de pratiquants imaginatifs qui savent réinventer, parfois à partir d'un vague souvenir, les techniques qui leur sont nécessaires.

Cette forme de l'apprentissage est à méditer. Seul le pratiquant peut apprendre. Un enseignant ne peut que lui mettre ce qu'il sait à disposition, et à lui d'en faire ce qu'il voudra, ou pourra.